Elle transpirait, les poumons enflammés et la peau brûlante.
Sa poitrine était comprimée dans un étau, ses jambes aussi lourdes que des ancres.
La jeune femme s’arrêta de courir. Elle se sentait à bout de souffle.
Ses angoisses la tenaillaient comme une paire de ciseaux.
Elle ne savait pas quoi faire pour respirer.
Elle regarda devant elle ; rien qu’elle pût distinguer.
Elle regarda derrière elle ; le chemin d’où elle était venue…
Refermé.
Elle observa alors avec attention l’endroit où elle se trouvait. Fougères, orties, ronces, plantes grimpantes, tout semblait exploser dans une formidable diversité de formes et de couleurs. Les racines débordaient du sol comme du lait oublié dans une casserole. Les feuilles des buissons couvraient jalousement des bourgeons tout en rondeurs, d’une douceur voluptueuse.
Oubliant sa détresse, elle s’agenouilla devant un plant à l’écart, intriguée.
Elle ressentait presque une forme de mélancolie en le considérant ainsi. Elle ne savait pas très bien d’où lui venait cette impression, mais elle la savait vraie.
Elle l’observa très attentivement et souleva la masse de feuilles jaunies. Là, croulantes sous le poids de l’agonie, des fleurs fanées se tenaient aussi voûtées que des vieilles femmes. Leurs robes défraîchies semblaient dépourvues d’énergie vitale.
Pourtant, quelque chose l’appelait.
Un effleurement subtil, profond, qui l’appelait au cœur d’elle-même.
Et elle sut.
Quelque chose battait dans les fleurs.
Quelque chose parcourait tout le plant, de la cime aux racines ; une onde magnétique à peine perceptible.
L’émotion la saisit brutalement. La compassion enserra sa poitrine pour l’ouvrir entièrement, comme une fenêtre déversant ses larmes de vie jusque dans ses paupières.
Son cœur devint éponge, dégorgeant craintes, ténèbres et égarements.
Alors, elle ouvrit les mains.
Ses paumes s’envolèrent vers les fleurs comme autant de caresses.
Ses doigts effleurèrent les pétales avec une infinie délicatesse.
Elle referma les paupières.
Sa souffle se ralentit. Il emmena avec lui peur, détresse et anxiété, comme autant d’oiseaux qui prenaient leur envol dans un ciel d’harmonie et de liberté.
Sa respiration se mit à battre à l’énergie de cette toute petite vie.
Des racines d’affection pure poussèrent dans son cœur. Elles sortirent de sa poitrine, enveloppèrent les pétales fanées dans une lumière douce, chaude et apaisante.